Marseille, source d’inspiration littéraire inépuisable

Marseille dans la littérature française ça donne quoi ? Pour le savoir, nous avons dépoussiéré quelques livres de nos bibliothèques et vous proposons une liste non exhaustive des auteurs qui ont écrit sur la cité phocéenne, de l’Antiquité à nos jours.

Que ce soit sur fond de drame familiale, d’histoire d’amour, d’intrigue policière, de guide culinaire, voire d’éléments historiques, la cité phocéenne regorge de chroniques à son sujet. Au fil des pages, on est plongé dans le centre ville et ses rues du Panier, le Vieux-Port et la Cannebière avec l’écrivain marseillais d’adoption Albert Cohen, on découvre des personnages hauts en couleur chez le célèbre Marcel Pagnol et on est renvoyé au cœur de l’histoire de France dans « Le Comte de Monte-Cristo ». La Corniche Kennedy est présentée sous un nouveau jour sous la plume de la contemporaine Maylis de Kerangal, puis Marseille est comme rattrapée par la réalité et son actualité avec les nombreux romans policiers qui pullulent ces dernières années dans les librairies.

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Quand la littérature classique évoque Marseille

Et si on commençait par le commencement avec la naissance de la ville et son origine grecque ?
La première trace écrite de la ville se trouve au début de l’ouvrage « L’Enquête » de l’historien grec Hérodote. Ecrit au Vème siècle avant J-C, il raconte l’arrivée de marchands en provenance de la cité grecque Phocée et le mythe de deux navigateurs : Simos et Protis. Nannus, le chef de la tribu locale prépare les noces de sa fille Gyptis qui, selon la coutume de la nation, doit choisir son mari parmi les invités en lui offrant de l’eau. Elle s’est alors tournée vers les Grecs et a présenté son verre à Protis qui, d’hôte est passé au statut de gendre pour Nannus. Ce dernier a donc offert, en guise de cadeau de noces aux époux, une terre pour la fondation d’une nouvelle ville, Massalia, future Marseille.

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Une terre d’accueil et une ville fondée sur l’amour, rien d’étonnant sur ce que deviendra Marseille. En faisant un bond dans le temps, on constate que la littérature française y a aussi consacré quelques pages. C’est le cas par exemple d’Emile Zola avec son roman « Les Mystères de Marseille », publié en 1867. C’est une histoire d’amour entre Philippe Cayol, un homme sans titre ni richesse et la jeune Blanche de Cazalis. Elle, étant la nièce du député local, millionnaire et homme d’affaires marseillais très influent. A priori, tout les oppose.

Un fond d’histoire d’amour c’est aussi le cœur de la célèbre œuvre d’Alexandre Dumas, « Le Comte de Monte-Cristo », publiée en 1844. On connait tous les péripéties d’Edmond Dantès : un jeune marin de 19 ans, qui débarque à Marseille pour se fiancer avec la belle Catalane Mercédès. Cependant il est dénoncé comme conspirateur bonapartiste et est enfermé au Château d’If.

La littérature classique a donc consacré un bon nombre de pages à Marseille. C’est le cas de Stendhal, en 1805 quand il arrive chez nous afin de suivre Mélanie Guibert, sa maîtresse et actrice, venue se produire au Grand Théâtre devenu l’Opéra de Marseille. Il écrit « Mémoires d’un touriste »:

« Je me promène sur le magnifique quai, à droite de la Canebière, qui conduit à la Bourse, au fort Saint-Jean et au bureau de la santé. Ce quai, assez large, est pavé de briques posées de champ, comme des V majuscules emboîtés les uns dans les autres. Là, on ne voit pas une figure triste. Ce quai est peuplé de matelots et de perroquets, et les beauprés des bâtiments arrivant d’Amérique viennent casser les vitres du premier étage des maisons »

En effet, la description de la ville n’y est pas en reste. On peut aussi citer «Marseille porte du Sud » d’Albert Londres, publié en 1926. Il y décrit la vivacité de la ville, riche et foisonnante. C’est un parfait témoignage du vivre ensemble entre marins, immigrés et voyageurs.

Dans «Transit » d’Anna Seghers (1944), il est aussi question de voyage et d’aventure. L’histoire prend place autour du port au moment où les troupes nazies arrivent en France. Opposants, déserteurs, ou encore juifs, tous se pressent sur les rivages de la Méditerranée en attente d’un embarquement vers la liberté. Marseille est aussi racontée par ceux qui restent, à l’image du marseillais d’adoption Albert Cohen. Il a écrit en 1954 « Le Livre de ma mère » où il raconte ses balades du dimanche le long de la corniche.

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Marcel Pagnol l’auteur emblématique de Marseille

A l’âge de 9 ans, Albert Cohen était le camarade de classe d’un des plus célèbres auteurs à avoir écrit sur la cité phocéenne. En effet Albert et Marcel Pagnol étaient tous deux élèves au lycée Thiers dans le centre ville de Marseille.

Car comment ne pas évoquer Marcel Pagnol et sa cultisme trilogie marseillaise: « Marius » (1929), « Fanny » (1931) et « César » (1936) ? Tout y est : l’évocation de coins spécifiques à la ville comme le Vieux-port, les quais devant le Ferry-boat, Notre-Dame de la Garde etc. Les clichés des marseillais, l’humour, l’exagération locale tant connue avec disputes et fâcheries haut en couleurs; mais aussi le flegme typiquement provençal à l’image des interminables parties de cartes dans le Bar de la Marine.
Et comment ne pas oublier les citations suivantes ?

« Tu me fends le cœur » dans Marius.

« Si vous voulez aller sur la mer, sans aucun risque de chavirer, alors, n’achetez pas un bateau : achetez une île ! », dans Fanny

« Un secret, ce n’est pas quelque chose qui ne se raconte pas. Mais c’est une chose qu’on se raconte à voix basse, et séparément », dans César.

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Marcel Pagnol, dont un circuit touristique est basé sur son oeuvre, nous offre là des tirades devenues classiques. Les « pagnolades » comme on les appelle. Mais la littérature a autre chose à dire sur Marseille …

La cité phocéenne, une terre de polar

section-polar-sud-bibliotheque-alcazar-marseilleSi Marseille devait être un genre littéraire, ça serait définitivement le polar. En effet, ses intrigues, sa complexité, son actualité autour des règlements de comptes et le clientélisme béant ont fait d’elle une terre propice aux romans policiers.
De la matière qui en a inspiré plus d’un dont Michèle Courdou, qui a écrit en 1994 « Les Chapacans ». L’année suivante, Philippe Carrese a publié de son côté « Trois jours d’engatse ». La même année est sorti également « Total Khéops » de Jean-Claude Izzo. Dans la foulée, d’autres auteurs ont choisi Marseille comme scène d’intrigue et de suspense. C’est le cas de Jean-Paul Delfino, François Thomazeau, Gilles Del Pappas, Maurice Gouiran et Serge Scotto.

Avant eux, Frédéric Dard avait déjà mis en scène pour la première fois son inspecteur San-Antonio. En effet, dans « Réglez-lui son compte ! », publié en 1949, l’action se passe au cœur de la cité phocéenne.

Que raconte la littérature contemporaine sur Marseille ?

Aujourd’hui, la littérature contemporaine rassemble un peu de tous ces sujets : Marseille avec sa mythologie, ses rêves et son désenchantement. On est nostalgique d’une époque et d’une jeunesse insouciante. En 2006, l’auteur marseillais Jean-Luc Luciani imaginait des rescapés d’un jeu de télé-réalité mortel. Ils s’enfuient à Marseille pour rechercher l’anonymat dans le roman intitulé « Le jeu et la traque : game over ».

Dans «Cinq dans tes yeux », d’Hadrien Bels, publié en 2021 on reparle de Marseille, de sa beauté et de ses habitants. L’auteur y critique la gentrification actuelle du Panier où depuis les années 1990, toutes les populations s’entremêlaient. Il parle avec nostalgie de cette bande arabo-comorienne qui y vivait avec cette insouciance et cette fougue bien marseillaise.

Cette ode à la jeunesse et à l’identité sociale des quartiers populaires, on la trouve aussi chez Maylis de Kerangal; dans « Corniche Kennedy » (2008), du nom de la corniche du John Fitzgerald Kennedy qui longe les plages marseillaises. Ce livre retrace le quotidien d’une bande d’amis téméraires se challengeant en plongeant du haut des falaises. L’actualité de la ville inspire également les auteurs. C’est le cas du drame de la rue d’Aubagne qu’on retrouve dans « Les trois collines » de Frédéric Valabrègue (2020).

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Pour finir sur une note joyeuse, on peut citer « Marseille cuisine le monde » de Verane Frediani paru en juin 2021. Cette marseillaise fait découvrir la richesse culinaire de la ville à travers 60 portraits d’habitants. Des plats typiquement marseillais et d’autres venus d’ailleurs comme les panisses, les pieds paquets, le couscous ou encore la pizza.

Alors vous l’aurez compris, avec les classiques ou bien avec la fleurissante littérature contemporaine, il y a de quoi lire. Munissez-vous d’une boisson chaude et plongez-vous dans l’intrigue à la sauce marseillaise.