Les particules fines dans l’air auraient elles une incidence sur la propagation du virus ?

Nous entrons dans une phase critique de la crise sanitaire mondiale déclenchée par le coronavirus le plus pernicieux de l’histoire récente de l’humanité. Le monde entier s’échine à trouver des moyens pour ralentir la diffusion de ce virus, qui reste mystérieux à bien des égards. Confinement, dépistages massifs ou traitements médicamenteux (dont la désormais fameuse chloroquine), ne sont qu’autant de tentatives allant dans ce sens. La situation sanitaire est très volatile. Elle évolue très rapidement et nous sommes soumis à un flux d’informations permanents. Comment voir plus clair dans une situation inédite aussi bien par sa gravité que par le niveau d’incertitude qui la caractérise?

Nous proposons ici une analyse du versant environnemental de la crise. Les intersections de la crise environnementale que nous connaissons depuis quelques décennies, et la crise sanitaire actuelle sont, à la vérité, multiples. Nous commençons ici par le lien le plus direct, s’agissant d’une maladie provoquée par un virus respiratoire : le rôle de la pollution de l’air.

Effet du confinement sur la pollution de l’air

La première grille d’analyse du versant environnemental de la crise pandémique actuelle a essentiellement porté sur les conséquences des politiques de confinement appliquées en Chine sur la pollution de l’air. Dans un précédent article , nous avions évoqué l’incidence radicale de la quarantaine en Chine. Les effets du confinement sur la pollution de l’air ne se sont pas fait attendre. Il a été constaté qu’un arrêt suffisamment prolongé des activités les plus polluantes peut faire reculer de façon spectaculaire la pollution de l’air.

Cet effet bénéfique du confinement sur la pollution de l’air a été aussi observé dans les autres régions soumises à cette régulation stricte. Par exemple, le cas du continent européen, dont l’Italie, la France et l’Espagne vient d’être solidement documenté,  avec dans certains cas des effets spectaculaires. Ainsi, pour ceux qui redoutent l’air frelaté du côté du périphérique parisien, un journaliste interrogé par France 3 Ile-de-France rapporte : « …le trafic automobile n’a rien à voir avec ce qu’il est d’habitude. Certains l’ont bien remarqué, ceux qui habitent le long des grands axes. Le long du périphérique, par exemple, l’air qu’on respire est le même que celui qu’on respire dans les grands parcs. C’est du jamais vu ».

Mais, pour autant, la pollution de l’air aux niveaux extrêmes que l’on connaît dans les grandes métropoles mondiales, aurait-elle quelque chose à avoir avec la dynamique épidémique mortifère du COVID-19 ? La question est beaucoup plus compliquée que celle portant sur l’effet d’une politique de confinement sur la qualité de l’air. Quelques pistes commencent à émerger.

Particules fines comme autoroute du COVID-19 ?

Ainsi une récente étude italienne (rapportée, entre autres, ici) suggère que les particules fines dans l’air pourraient transporter le virus du Covid-19. Selon cette étude, il y aurait une corrélation entre le taux élevé des particules fines et l’augmentation des cas de contamination par le coronavirus. En Italie, les régions les plus touchées étaient aussi les plus polluées.
Plus précisément, les chercheurs italiens ont évalué la concentration de particules fines dans plusieurs villes italiennes, entre le 10 février et le 29 février, et ils ont observé que les régions les plus touchées par le virus, à l’instar de la vallée de Pô, étaient également les plus polluées. L’hypothèse qu’ils ont en tiré est que le virus pourrait bien « surfer » sur les particules fines en suspension dans l’air, ce qui impliquerait une forme de transmission aérienne du virus. La contagiosité très élevée de la maladie s’expliquerait alors par ce mode de transmission. Comme indiqué par les chercheurs, cela aurait aussi une implication fâcheuse pour l’efficacité des fameux gestes « barrage » utilement martelés par les autorités sanitaires. Ainsi, la distance d’un mètre minimum entre deux individus pourrait s’avérer insuffisante. Le port d’un masque devrait alors être généralisé comme en Asie. Bien sûr, les conclusions de l’équipe italienne n’ont pas encore été confirmées, mais elles ouvrent une voie de recherche, nous semble-t-il, intéressante et potentiellement majeure.

Une conclusion positive

Il y a une lecture plus positive de ces conclusions. Comme indiqué en introduction, il est maintenant établi qu’à la fin de périodes de confinement suffisamment longues et suffisamment respectées par les populations, la présence des particules fines dans l’air serait drastiquement réduite. Ce qui permettrait donc, si l’on croit les conclusions de cette étude italienne, de limiter la contagiosité du COVID-19. Bien sûr ceci n’exonère pas les autorités de mettre en place le plan de déconfinement le plus approprié.

Naïma Chenah